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Studio Mobile, un mois en centre de détention.

Cet article est une archive, certaines actualités sont peut-être dépassées.

Des textes inspirés par la société, une compo aux sonorités ethniques

Ravis de pouvoir tester de nouvelles disciplines, les cinq détenus qui se sont portés volontaires pour participer au Studio Mobile sont curieux et ouverts au monde. Lors de précédents ateliers que Freddy et Moh ont mené en milieu carcéral, les détenus avaient plutôt envie de parler de leur histoire personnelle, de la vie lorsque l’on est privé de ses libertés. Ici, tous ont choisi des thèmes aux enjeux sociétaux : l’humanisme, les migrations des personnes en situation de détresse, l’amour et la nécessité de « se parler ». À eux cinq, ils ont déroulé une forme de cadavre exquis musical pour lequel nous leur avons laissé carte blanche. Un slam écrit ensemble, composé à dix mains et qui relie les pensées d’hommes de 25 à 60 ans.

Freddy et Moh ont été frappés par l’aisance avec laquelle chacun s’est approprié les temps d’écriture et de composition musicale. L’écriture n’était pas un exercice nouveau pour Khaled qui a passé 21 ans en détention et s’est mis à écrire très vite après son incarcération. Quelques-uns de ses poèmes ont d’ailleurs été publiés et certains ont été primés à l’occasion de concours nationaux.

Pour Sébastien, en revanche, l’expérience était toute nouvelle. Ces ateliers lui ont donné le goût de l’écriture : « Depuis cet atelier, j’ai un carnet et j’écris des choses personnelles. Ce sont des choses que je n’arrivais pas à dire avant, ça m’a permis de me libérer. Ça a un effet thérapeutique pour moi… ».

Expérimenter la composition sur un logiciel informatique était inédit pour chacun des participants. Puisque certains d’entre eux sont coupés du monde extérieur depuis longtemps, composer sur ordinateur leur permet d’appréhender des technologies qui ont largement évolué depuis qu’ils n’y ont plus accès. Avec Moh, ils se sont initiés à la MAO (Musique Assistée par Ordinateur) et ils ont bénéficié de ses conseils pour créer le morceau qui a servi de trame à leur slam. Ils ont choisi ensemble de lui donner une couleur ethnique, avec des percussions.

Des mots sur papier à l’expérience live

Début novembre, ils ont présenté le fruit de ces ateliers devant une trentaine de co-détenus, juste avant un concert de James IzCray.

Lorsque l’on arrive dans la salle qui va accueillir le concert, on oublierait presque que l’on se trouve dans une enceinte pénitentiaire. Les murs affichent les traces d’autres projets culturels : projets photo, ateliers graff, projets cinématographiques, ateliers philo… Régulièrement, des artistes accompagnent les détenus dans l’expérimentation de nouvelles formes d’expression artistique.

Cette fois, le local a pris des allures de salle de concert et les participants au Studio Mobile ont expérimenté la prestation live. Après une dernière répétition pour caler leur flow sur le rythme du morceau, ils ont déclamé leur texte à tour de rôle devant les autres détenus, très attentifs aux messages qu’ils écoutaient. James IzCray a pris la suite et les détenus ont découvert à leur tour sa musique ! Tous ont échangé leurs impressions après le concert, dans un temps convivial de rencontre et de partage.


Projet mené dans le cadre du protocole Culture-Justice, soutenu par la DRAC et Hors-Cadre et mené en partenariat avec le Centre pénitentiaire d’Annœullin.

En savoir plus sur le Protocole National Culture-Justice

Conformément au code de procédure pénale et à l’esprit des règles pénitentiaires européennes, la privation de la liberté n’est pas la privation du droit d’accès à la culture. Ainsi, le protocole national Culture-Justice signé le 30 mars 2009 entre le Ministère de la Culture et le Ministère de la Justice concernant le développement culturel en milieu pénitentiaire prévoit de permettre à toute personne placée sous main de justice de pouvoir accéder à la culture de la même manière que tout citoyen.

La Direction Régionale des Affaires Culturelles (DRAC) du Nord-Pas de Calais et la Direction Interrégionale des Services Pénitentiaires (DISP) des Hauts-de-France déclinent ce protocole national Culture-Justice sur leur territoire par le biais de conventions triennales depuis 2002. Par le biais de cette convention régionale Culture-Justice, la Drac Nord-Pas de Calais et la DISP de Lille s’associent pour le développement culturel en milieu pénitentiaire faisant appel à la participation d’artistes, de professionnels du champ culturel ou d’institutions culturelles en liaison avec les collectivités territoriales.

Tous les champs d’expressions artistiques et culturels sont concernés : le livre et la lecture, le spectacle vivant (théâtre, musique, danse, cirque et arts de la rue), les cultures urbaines, le cinéma, l’audiovisuel et le multimédia, les arts plastiques, le patrimoine (musées, architecture et monuments). L’accès des publics détenus à une programmation culturelle de qualité permet de limiter les effets désocialisants de leur incarcération et constitue donc un élément important de préparation à leur sortie et de prévention de la récidive.
Tisser des liens avec les structures culturelles du territoire, c’est permettre au public détenu de se concevoir comme un citoyen à part entière, c’est créer du lien social.

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